« Je ne veux pas d’enfants parce que je ne veux pas d’enfants. »
– Tu es encore jeune. Tu changeras d’idées quand tu rencontreras le bon.
« Non, je ne veux pas d’enfants et c’est comme ça. »
– N’as-tu pas peur de vieillir sans enfant ?
« Oui, j’ai une peur bleue de vieillir sans enfant. J’ai peur que personne ne prenne soin de moi durant mes vieux jours. J’ai peur de me retrouver dans un foyer de personnes âgées sans visite ni distraction. J’ai une peur viscérale de la solitude. Et que dire de ne pas survivre au-delà de la mort.
Mais est-ce là une bonne raison de vouloir être maman ?
Je définirai autrement le sens de ma vie. J’écrirai ma liberté. Je ferai autre chose de mon énergie féconde. »
Les propos fictifs ci-haut reflètent une réalité bien présente au Québec. Que ce soit par choix ou à cause des circonstances de la vie, une québécoise sur cinq n’aura pas d’enfant à la fin de sa période de fécondité (Institut de la statistique du Québec).
Cet article traite de la réalité de ces femmes.
Ces femmes souvent reléguées au second plan. Et que dire de la femme sans enfant qui vieillit. Pleins feux sur ces héroïnes qui défient la fécondité et le temps qui passe.
Sans enfant par choix
Le désir d’avoir un enfant n’est pas inné; il est socialement construit. En effet, le lien automatique que nous faisons entre femmes et maternité est extrêmement puissant. Une femme qui ne veut pas fonder une famille suscite généralement des interrogations. La pression sociale est très forte.
D’ailleurs, même le mot qui décrit une femme n’ayant jamais accouché est affreusement laid : « nullipare ».
Mais au bout du compte, que ce soit une décision tranchée ou une valse-hésitation, la route de chaque femme est unique et il appartient à elle seule de choisir ou non la maternité.
Sans enfant par circonstances de la vie
Nous pouvons être sans enfant par choix mais aussi dû à des circonstances de la vie. Les raisons les plus souvent en cause sont la présence de problèmes de santé, une situation d’infertilité ou le fait de ne pas avoir trouvé le bon partenaire au bon moment. Un manque de stabilité affective peut aussi empêcher le projet d’avoir un enfant.
S’il y avait à la base un désir de maternité, un processus de deuil sera nécessaire dans ce cas de figure.
La liberté
Mais tout n’est pas noir pour autant.
Ne pas avoir d’enfant permet de jouir d’une grande liberté : « Je mange à l’heure que je veux et je me couche à l’heure que je veux. Je n’ai aucun compte à rendre. Et puis, je sors tous les jours. »
« Je ne me ronge pas les sangs en me demandant si je fais les bonnes choses pour mon petit. Je n’angoisse pas en pensant à tous les malheurs qui pourraient lui arriver. »
Ainsi, la femme sans enfant qui vieillit doit trouver en elle des ressources personnelles pour écrire sa liberté et ses valeurs. Elle doit aller à la rencontre d’elle-même, écouter sa vraie nature et se demander ce qui la rend heureuse. À la manière d’un électron libre, elle doit déployer toute sa créativité pour s’ouvrir aux autres en dehors du cercle familial.
Elle ose proclamer que le bonheur ne réside pas seulement dans le fait de donner la vie. Son leitmotiv est que l’étincelle de vie est partout.
La femme sans enfant qui vieillit a aussi la possibilité de développer une riche vie intérieure, par exemple par le biais de la lecture et de la spiritualité. Elle est libre de s’investir dans un projet professionnel ou tout autre projet qui est difficile à conjuguer avec les contraintes qu’amènent une vie de famille.
L’amitié
La femme âgée sans enfant a possiblement aussi plus de temps à consacrer à ses amitiés. N’étant pas focalisée sur ses descendants, elle serait plus disponible pour son réseau d’amis.
Avec ceux-ci, elle jase, rit, raconte des histoires, refait le monde; elle oriente son énergie maternelle vers l’extérieur.
La force de son réseau d’amis augmente son acuité intellectuelle, son goût du savoir et son estime de soi.
Les amis peuvent devenir en quelque sorte la famille élargie de la femme âgée sans enfant.
En couple avec un partenaire ayant déjà des enfants
La femme sans enfant peut aussi faire le choix de trouver un partenaire ayant déjà des enfants. Ceci lui permet d’exprimer sa maternité autrement. Elle peut donner de l’amour et du soutien aux enfants de son partenaire et en recevoir en retour.
Petits-enfants de substitution
Même si elle n’a pas de petits-enfants biologiques, la femme sans enfant peut être une amoureuse des enfants. Prétendre le contraire est un cliché tenace. Ne pas avoir d’enfant ne signifie pas qu’on n’a pas d’enfant dans sa vie.
En effet, la femme âgée sans enfant peut parfois compter sur des « petits-enfants de substitution » qui contribuent à son bien-être, comme des neveux ou nièces ou encore des enfants rencontrés lors d’activités sportives ou sociales.
Les « petits-enfants de substitution » procureraient un sentiment d’attachement et d’utilité à la femme sans enfant.
Malgré les amis qui ont souvent le même âge et les petits-enfants de substitution qui font leur vie, il reste que vieillir seul est un enjeu.
Quand la femme sans enfant doit quitter son domicile
Ainsi, arrive un temps où la femme sans enfant qui vieillit doit quitter son domicile. Son état de santé et son autonomie déclinant, elle doit quitter sa maison pour aller vivre en foyer pour personnes âgées.
Puisqu’elle n’a pas d’enfant, ce sont ses frères et sœurs, neveux et nièces, cousins ou amis plus jeunes qui pourront l’accompagner à cette étape. Les services de santé et services sociaux ou même des bénévoles peuvent aussi la soutenir à ce niveau.
Le testament biologique de la femme sans enfant
Le testament biologique est un document de référence pour les proches et le personnel médical, dans l’éventualité où la personne est incapable d’exprimer ses volontés concernant les soins de derniers recours. Il permet de préciser ce que la personne accepte et refuse comme traitements médicaux, ainsi que ses intentions en matière de dons d’organes.
Le testament biologique permet de choisir qui, en compagnie des médecins traitants, s’occupera de la personne et pourra signer les autorisations nécessaires pour les soins médicaux en fin de vie.
Il est donc important pour la femme sans enfant de faire un testament biologique. Elle pourra ainsi choisir le ou la proche qui s’occupera d’elle.
Les Petits Frères : un organisme qui s’occupe des aînés seuls
D’autre part, si la femme sans enfant vit de la solitude lorsqu’elle atteint le grand âge, elle peut compter sur le soutien de divers organismes. Mentionnons notamment l’organisme Les Petits Frères.
La mission de cet organisme est de contrer l’isolement des personnes âgées jusqu’à la fin de leur vie. Plus de 2000 bénévoles y œuvrent pour accompagner les aînés à des fêtes, les conduire à des activités, les appeler, se jumeler à eux, leur rendre visite et les aider à réaliser leurs rêves.
L’intervenant en soins spirituels
La femme sans enfant peut aussi avoir recours à un intervenant en soins spirituels lorsqu’elle est en fin de vie. Cet intervenant lui offre du soutien et de l’accompagnement au niveau spirituel et religieux ainsi qu’à sa famille et à ses proches. L’intervenant répond aux consultations en matière théologique, spirituelle ou éthique et participe aux réunions interdisciplinaires. Ce support moral peut être très bénéfique si la femme sans enfant se sent esseulée.
Conclusion
Doit-on absolument porter un enfant pour s’accomplir en tant que femme?
Bien sûr que non!
Mais il faut beaucoup de panache et de courage pour s’assumer avec fierté en tant que femme-sans-enfant-qui-a-beaucoup-à-apporter-à-la-société.
Que la femme soit sans enfant par choix ou à cause des circonstances de la vie, elle a soif de la même chose qu’une femme avec enfants : se sentir utile et valorisée.
Libre, la femme sans enfant trace son chemin elle-même. Elle doit se créer un bon réseau de soutien, particulièrement en prévision de ses vieux jours : amis et membres de la famille plus jeunes qu’elle, enfants et petits-enfants de substitution.
La femme sans enfant qui vieillit peut aussi utiliser le réseau communautaire pour combattre la solitude.
En fin de vie, elle peut être accompagnée par un intervenant en soins spirituels pour l’aider à traverser l’épreuve de la mort.
La femme âgée sans enfant a dû affronter la pression de la maternité. Elle a dû assumer un choix difficile ou accepter une situation hors de son contrôle. Elle doit aussi affronter les affres de la vieillesse.
La place de la femme âgée sans enfant devrait être beaucoup plus valorisée au sein de la société.
Tout comme la place de l’homme âgé sans enfant. Je discuterai dans un prochain article de la réalité de ces hommes.
Bravo Prunelle; très bon article. Ce sera probablement mon cas (femme sans enfant). Courage!
Bravo Prunelle pour ton super bel article!
Félicitations Prunelle, Moi aussi je suis une femme sans enfant. ça fait effectivement peur de vieillir sans enfants. Mais il y a malheureusement des parents qui vont vieillir sans leurs enfants car ils sont trop occupés pour s’occuper du ou des parents âgés. Moi-même j’ai négligé ma mère. Ma soeur était proche de la résidence de ma mère. Elle est maintenant décédée et depuis je réalise que je vais vieillir un peu seule si mon mari décède avant moi.
Merci pour ton blogue. Les deuils blancs aussi c’était intéressant.