Quand j’étais jeune, il n’y avait aucuns réseaux sociaux. Non, aucuns. J’avais certes un petit réseau social, quelques belles amitiés, mais celles-ci étaient toutes en profondeur. On n’avait pas peur de s’appeler à tout moment pour se raconter nos histoires. On se supportait. On se chicanait. Et on se réconciliait. C’était un petit réseau mais efficace. Un réseau de proximité. Je m’y sentais à ma place. Aujourd’hui, les réseaux sociaux ont pris toute la place dans nos vies.

 

Je me lève, je regarde mon fil d’actualité facebook (ou insta J).

 

Je travaille, mais dès que j’ai une pause, je retourne sur les réseaux sociaux. Je me demande si je n’ai pas manqué quelque chose d’important.

 

Je suis dans l’autobus. J’observe à peine les gens autour de moi. Je regarde mon téléphone. Je ne suis plus capable de m’ennuyer et de rien faire.

 

J’attends dans une file d’attente. Je préfère regarder mon téléphone plutôt que d’engager une conversation avec un inconnu ou même une personne que je connais (?!).

 

Avec les réseaux sociaux, on est hyper-connectés à pleins de monde, mais ce sont le plus souvent des contacts superficiels, voire même des personnes qu’on a jamais rencontrées.

 

Or, c’est justement la qualité de nos relations sociales dans le réel qui a un impact sur notre santé mentale.

 

Le besoin de socialiser est fondamental. Malheureusement, cette socialisation se déplace de plus en plus vers le virtuel.

 

 

Une course à l’idéal

 

Les médias sociaux nous exposent à beaucoup d’images montrant des personnes ayant des vies vibrantes et faisant des activités plaisantes. Des images parfaites qui ne reflètent pas la réalité. C’est une course à la réussite, à la performance, à l’idéal, et si vous n’êtes pas à l’image de ce que la société nous propose, il est fort possible que vous vous sentiez déprimé. Parfois, on se compare. On essaie de se prouver qu’on a une vie tout aussi intéressante en prenant des photos dans le but de se mettre en valeur.

 

Les abonnés et les likes

 

On cherche souvent à avoir plus d’abonnés. Mais demandons-nous, qu’est-ce que ça nous donne d’avoir 500 ou 1000 abonnés ? Un de plus ou un de moins, qu’est-ce que ça change à notre vie ?

 

Il y a aussi les likes. Ces outils qui nous permettent de calculer notre popularité par rapport au nombre de personnes qui aiment la publication. Nous sommes toujours contents quand nous avons de plus en plus de likes, mais si c’est le contraire, il ne faut pas se sentir blessé pour autant. Qu’est-ce que ça nous apporte en réalité d’avoir 100 likes?

 

La culture du Moi

 

Les réseaux sociaux encouragent fortement le narcissisme et la culture du Moi. Au lieu d’être tourné vers l’autre, dans toutes ses subtilités, on se concentre uniquement sur soi. On se met en scène. Soi-même dans son quotidien, soi-même dans sa bulle. Au fond, ça dénote un sentiment profond de solitude. Oui, c’est une façon de se connecter à l’autre mais à travers un filtre. On met en scène une image de nous-mêmes qui ne correspond pas nécessairement à la réalité. On veut plaire à tout prix. Ce narcissisme nuit à la santé mentale car la santé mentale passe par le fait de se connecter réellement aux autres. Des échanges directs, voilà ce qui permet de se lier authentiquement, de ressentir une connexion émotionnelle avec les autres (ou pas). Le manque d’échanges directs ne permet pas de mettre à nu ses idées, de débattre sur le vif. La bulle dans laquelle on se réfugie nous fait peu ou pas voir d’autres perspectives.

 

Une baisse de la créativité

 

Lorsqu’on est continuellement sur les réseaux sociaux, on tend à regarder passivement du contenu. Notre cerveau est bombardé d’images et de textes qui défilent à une vitesse folle. Bien sûr, on peut mettre des likes ici et là ou commenter quelques publications, mais cette surcharge informationnelle nous empêche de libérer notre créativité. Dans les arts, les sciences, les sports et plus encore.

 

 

L’indépendance intellectuelle

 

Les utilisateurs des réseaux sociaux perdent de leur indépendance intellectuelle. Les algorithmes sont là pour cibler les préférences de l’utilisateur et s’assurer de présenter à celui-ci un maximum de contenu qu’on sait va lui plaire, sur lequel il va cliquer, qu’il va avoir envie de partager et qu’il va avoir envie de consommer. L’utilisateur finit par recevoir de l’algorithme des informations qui se ressemblent constamment. Sa perception de la réalité devient basée sur des contenus qui sont filtrés constamment, ce qui renforce ses propres convictions. Le fait de ne pas être exposé à différentes perspectives, à des nouveaux points de vue, à différents types d’opinions, cela fait que sa capacité à développer un sens critique devient limitée. Donc l’utilisateur n’est pas mis au défi dans sa perception de la réalité et a de la difficulté à s’ouvrir à la différence et au débat.

 

 

Le soutien émotionnel

Mais tout n’est pas noir pour autant.

 

Les médias sociaux procurent aussi du soutien émotionnel lorsque les utilisateurs interagissent en tête à tête. Par exemple, une personne qui se sent déprimée mais n’a pas envie d’une longue conversation téléphonique peut certainement retirer un bénéfice de parler en ligne avec ses proches.

 

 

La conscience numérique

 

L’arrivée des réseaux sociaux ouvre aussi vers une nouvelle conscience. Avant, on était chacun dans sa vallée. Maintenant, en temps réel, on est branché sur la planète. Nous apprenons qu’il y a une catastrophe humanitaire, nous avons une émotion pour ça, nous voulons réagir, nous voulons dénoncer, nous voulons aider. Avec les réseaux sociaux, nous augmentons notre conscience de ce qui se passe à l’échelle planétaire. Nous pouvons ressentir de l’impuissance, et même de l’accoutumance face à ces images. Par ailleurs, en même temps qu’il y a une banalisation, il y a un développement des organismes humanitaires et des blogues.

 

Conclusion

 

Avec les réseaux sociaux, nous avons accès à beaucoup plus de populations, plus de notoriété, plus d’échanges, entre autres pour mieux faire connaître ses services et ses produits. Donc au final il y a des bénéfices. Mais d’autre part, leur utilisation peut compromettre notre sentiment même d’exister, c’est-à-dire notre capacité d’être ici dans le moment présent et d’avoir une qualité de présence auprès des personnes qui nous sont les plus chères.

 

Il va sans dire que celui qui résiste, qui ne participe pas aux réseaux sociaux peut être exclu d’une grande partie des interactions avec ses pairs.

 

Alors que faire pour lever les yeux de nos téléphones et utiliser sainement les réseaux sociaux ?

 

Bien sûr, passer moins de temps devant nos écrans.

 

Mais au-delà de cette habitude à modifier, je crois que les gouvernements devraient exiger des géants du web le développement d’une éthique planétaire. Cela signifie que toute action prise par les GAFA devrait être basée sur les droits humains. Autrement dit, est-ce que l’action du géant numérique place le bien-être de la personne et des communautés avant les impératifs économiques ?

 

Prunelle