Dans près de 40 ans, un québécois sur trois sera un aîné. La population vieillit donc de plus en plus, et avec ce phénomène apparaît une augmentation des cas de maladies neurodégénératives, telles que les maladies d’Alzheimer et de Parkinson.
J’écrirai une série d’articles sur les maladies neurodégénératives, en débutant en premier lieu par la maladie de Parkinson.
Toutes les personnes ayant la maladie de Parkinson le disent, quand nous sommes atteints de cette maladie, il est épanouissant de s’engager dans des activités signifiantes. Cela permet d’oublier momentanément la maladie, de freiner les symptômes et de renforcer certaines habiletés. L’action est donc une composante indispensable pour aller mieux.
Toutefois, lors de l’annonce du diagnostic et même parfois plusieurs années après, il importe de ne pas négliger l’aspect psychologique associé à une telle condition. On peut par exemple trouver que c’est injuste, se demander « pourquoi moi ? » ou encore « qu’est-ce que j’ai fait pour mériter ça ? ». C’est en faisant un travail de fond sur soi-même, en parlant ouvertement de sa maladie, mais pas que, que l’on peut accepter ce qui nous arrive.
L’acceptation prend du temps et le plus beau cadeau qu’une personne ayant la maladie de Parkinson puisse se faire à elle-même est d’apprendre à s’aimer sans équivoque pour ce qu’elle est et non ce qu’elle fait.
Mécanismes biologiques
Dans le cerveau, il existe des milliards de cellules nerveuses (neurones) rattachées en circuits neuronaux. Lorsqu’un mouvement est effectué ou qu’une pensée est produite, les neurones échangent entre elles des messagers chimiques appelés neurotransmetteurs.
Dans la maladie de Parkinson, il y a un dérèglement d’un neurotransmetteur nommé dopamine. En fait, il y a un déficit en dopamine au niveau de certaines structures cérébrales. Il faut noter par ailleurs que les altérations cérébrales ne concernent pas seulement la dopamine mais également d’autres neurotransmetteurs (ex. sérotonine, glutamate, etc.).
Ainsi, plusieurs structures cérébrales sont atteintes au cours de la maladie, ce qui cause notamment des troubles de l’olfaction et du sommeil. Ensuite, des structures impliquées dans la régulation motrice (substance noire) vont être atteintes et entraîner les symptômes moteurs de la maladie. Enfin, après plusieurs années d’évolution, des structures corticales peuvent être touchées.
Quelques statistiques
Chaque jour, au Canada, 25 personnes reçoivent un diagnostic de maladie de Parkinson. Ces personnes doivent composer avec une nouvelle réalité qui peut les éloigner de leurs rêves et de leurs objectifs de vie. Le fardeau de la maladie est appréciable puisqu’en 2031, le nombre de Canadiens atteints de cette maladie devrait être de plus de 160 000 personnes.
On a également remarqué que l’incidence de la maladie augmente avec l’âge. De toutes les personnes chez qui cette maladie est diagnostiquée, 85% ont plus de 65 ans.
Au niveau du sexe, les hommes sont 1,5 fois plus touchés que les femmes par la maladie de Parkinson, mais la progression de la maladie est généralement plus rapide pour ces dernières. Ces différences entre les hommes et les femmes seraient attribuables aux hormones.
À quoi ressemble cette maladie ?
La maladie de Parkinson comporte plusieurs symptômes, qui diffèrent d’une personne atteinte à l’autre. Il y a tout d’abord les symptômes moteurs, soit les tremblements, la rigidité, la lenteur des mouvements, les pertes d’équilibre, le « freezing » (blocage des jambes pendant la marche), la dysphagie (sensation de gêne lors de la déglutition) et les crampes musculaires.
En deuxième lieu, il y a les symptômes non-moteurs, notamment la dépression, l’anxiété, les troubles cognitifs, la perte de l’odorat, la constipation, la démence et la fatigue. Les symptômes non-moteurs peuvent apparaître longtemps avant les symptômes moteurs. Ils peuvent être difficiles à reconnaître et les personnes qui en souffrent ne se rendent pas compte qu’ils sont liés à la maladie de Parkinson.
La maladie de Parkinson est une maladie chronique et progressive. Les symptômes s’installent graduellement et deviennent ensuite de plus en plus sévères. L’évolution de la maladie est propre à chaque personne. C’est pourquoi il est difficile de prédire la vitesse de progression.
Les causes de la maladie de Parkinson
Les causes précises de la maladie de Parkinson sont inconnues. Dans les dernières années, les chercheurs ont montré que le développement de la maladie est multifactoriel. La génétique, l’environnement, le vieillissement, ainsi que d’autres facteurs, interagissent ensemble pour causer la maladie de Parkinson.
Des mutations génétiques ont été identifiées chez les personnes qui vivent avec la maladie de Parkinson. Ces mutations n’entraînent pas systématiquement la maladie mais en augmentent le risque d’apparition. Au niveau héréditaire, l’immense majorité des cas de Parkinson ne sont pas transmissibles des parents à leurs enfants.
L’exposition à certaines toxines dans l’environnement est susceptible de contribuer au développement de la maladie de Parkinson. Les principaux facteurs environnementaux impliqués dans la maladie sont : certains pesticides, le manganèse, le monoxyde de carbone, le sulfure de carbone et certains métaux lourds. L’exposition à ces facteurs est souvent professionnelle, comme les pesticides dans le cas des agriculteurs.
D’autre part, l’âge avancé, avoir la peau blanche, être un homme et vivre dans une zone rurale sont des facteurs qui augmentent le risque de développer la maladie. Certains types de professionnels, comme les agriculteurs ou les employés dans des usines, peuvent être plus exposés à certains produits chimiques ou toxines qui augmentent le risque de développer la maladie. De plus, différents types de blessures graves à la tête et au cerveau, comme les commotions cérébrales, augmentent le risque de développer la maladie.
Les traitements
Actuellement, il existe diverses options de traitement de la maladie de Parkinson : médicaments à prise orale, système transdermique (timbre), gel intestinal, stimulation cérébrale profonde et traitements parallèles.
Le traitement médicamenteux est celui qu’on utilise le plus souvent contre la maladie de Parkinson. Le choix de médicaments est vaste. Les médicaments à prise orale sont efficaces en début de traitement, mais on peut aussi recourir à un système transdermique (un timbre), qui libère le médicament à travers la peau.
À un stade plus avancé de la maladie, il est possible que les symptômes moteurs soient invalidants et qu’ils ne puissent plus être maîtrisés au moyen de médicaments à prise orale ou de timbre. C’est alors qu’entrent en jeu d’autres options de traitement, notamment un médicament injectable ou les traitements qui nécessite une intervention.
Le gel intestinal est un exemple de traitement requérant une intervention. Un gel est pompé en continu tout au long de la journée, jusqu’au coucher, directement dans l’intestin grêle au moyen d’une sonde.
Quant à la stimulation cérébrale profonde, des électrodes sont implantées dans certaines zones du cerveau et sont reliés par des fils à un appareil implanté sous la peau dans la partie supérieure de la poitrine. Les électrodes produisent des impulsions électriques qui aident à régulariser les impulsions anormales.
Le traitement de la maladie de Parkinson peut comprendre des traitements parallèles au traitement standard. En voici quelques exemples : physiothérapie, orthophonie, exercices cognitifs, massothérapie, etc.
Ce qui aide à aller mieux
Malgré les traitements, les personnes atteintes de la maladie de Parkinson doivent composer au quotidien avec des limitations fonctionnelles. Celles-ci sont toutefois plus faciles à gérer lorsque la personne adopte une attitude mentale positive et qu’elle fait preuve de résilience.
D’autres facteurs constituent des forces pour retrouver une vie épanouissante malgré la maladie : l’exercice physique, l’engagement dans des activités signifiantes, maintenir une intimité dans le couple et avoir un bon partenaire, ne pas s’isoler et appartenir à une communauté.
Avoir une attitude mentale positive
Avoir une attitude mentale positive aide à se sentir mieux. Il s’agit d’être en mesure de reconnaître une situation dans son ensemble (le négatif comme le positif), tout en choisissant de mettre l’accent sur le positif et de continuer d’avancer.
Par exemple, une personne atteinte par le Parkinson se rend compte qu’elle est anxieuse, qu’elle ne dort pas bien et qu’elle a des difficultés à la marche. Néanmoins, elle est capable de s’adonner à des séances de tai chi et elle bénéficie du soutien indéfectible de son partenaire.
Elle décide alors de mettre le focus sur le positif, en s’attardant à ce qu’elle accomplit et à son environnement social, et en ne se définissant pas en fonction de la maladie, mais plutôt en fonction de ses valeurs et objectifs. Elle reconnaît également l’importance de faire les choses comme elle peut et non comme elle veut. Elle choisit d’être bienveillante envers elle-même.
Être résilient
Faire preuve de résilience face à la maladie de Parkinson est un talent psychique qui permet de rebondir et de se transformer vers un état plus épanoui. La résilience implique de reconnaître la maladie et de la dépasser sans toutefois la fuir (la fuite relève plutôt de l’instinct et entraîne un éloignement de la situation anxiogène).
Dans la résilience, il y a du courage, de la transcendance, de la profondeur. Ce n’est pas la réussite à tout prix (telle que préconisée par la société de performance) ni le fait de s’opposer ou de résister à la maladie.
La personne résiliente sait qu’elle ne reviendra pas exactement comme avant. Comme le dit Boris Cyrulnik, elle fait face à l’adversité et tente de renaître malgré la maladie. Mais la résilience n’est pas qu’une ou des capacités qu’on a au fond de nous ; c’est une force sociale. La personne résiliente bénéficie bien souvent de tuteurs de résilience qui vont l’épauler dans son processus de développement.
L’exercice physique
Sans tomber dans l’excès, faire suffisamment d’exercice physique peut retarder la progression de la maladie de Parkinson. L’activité physique permet de travailler la souplesse, l’équilibre et prévient les chutes. Elle favorise le développement de connexions entre les neurones, en plus d’améliorer les liens sociaux et la qualité de vie de la personne atteinte. Les activités d’endurance, de renforcement musculaire, de même que d’équilibre et de souplesse sont particulièrement indiquées.
Sans compter la danse, qui permet de travailler tout à la fois. D’ailleurs, la Dance Movement Therapy (DMT) est une méthode de rééducation spécifique qui s’est développé en s’inspirant de la danse. Cette méthode ne reprend pas les mouvements de la danse classique, mais permet à la personne de s’exprimer à travers cette activité et de recentrer son attention sur ses capacités motrices.
L’engagement dans des activités signifiantes
Les activités signifiantes correspondent à des activités qui ont un sens pour la personne, dans un contexte socioculturel donné. Lorsque la maladie survient, l’engagement dans des activités signifiantes est d’autant plus important qu’il permet de se valoriser, de se sentir utile et de se réinventer.
Les activités signifiantes sont multiples et ce peut être notamment de participer à un groupe de danse (ex. Parkinson en mouvement), d’écouter de la musique, lire sur sa maladie et plus encore.
Maintenir une intimité dans le couple et avoir un bon partenaire
L’intimité physique et émotionnelle sont des besoins universels. Nous avons ainsi tous besoin d’aimer et d’être aimés, de toucher et d’être touchés, ainsi que d’avoir des relations affectueuses et empathiques.
La maladie de Parkinson peut entraîner des changements dans la dynamique de couple et dans la sexualité : difficultés de communication, estime de soi, tremblements, rigidité, baisse du désir sexuel, etc.
Mais il est possible de maintenir une intimité dans le couple en parlant ouvertement de sexualité, en étant patient, en distinguant activités intimes et activités sexuelles et en se concentrant sur le plaisir et non sur la performance.
D’autre part, avoir un bon partenaire aide la personne atteinte de Parkinson à aller mieux. Cela signifie que le partenaire accepte que la relation ne sera plus exactement comme avant. Il aide la personne malade à surmonter la maladie et l’accompagne dans ses moments de découragement.
Ne pas s’isoler et appartenir à une communauté
Pour aller mieux, la personne atteinte du Parkinson a avantage à ne pas rester seule, à rejoindre des groupes dans la communauté et à trouver des moyens d’élargir son réseau social. Mais comment faire alors pour agrandir son réseau social ? Tout d’abord, dire oui quand on lui propose une sortie et être elle-même force de proposition. Ensuite, s’impliquer dans la vie associative ou dans une activité bénévole est une bonne façon pour elle de développer son réseau amical. Il importe aussi de relancer son réseau dès que l’occasion se présente. Enfin, la personne atteinte du Parkinson a intérêt à faire un petit horaire afin de trouver du temps à consacrer à ses amis.
Au niveau des organismes dans la communauté, faisons mention de Parkinson Québec, qui offre l’information et les services de soutien nécessaires pour accompagner les personnes touchées par la maladie de Parkinson. L’organisme offre une panoplie de services, comme une ligne d’information, des groupes d’exercices, des conférences, des groupes de soutien, etc. Il s’agit d’une communauté à part entière !
En conclusion
La maladie de Parkinson représente un fardeau appréciable pour notre société. Caractérisée par un dérèglement du système dopaminergique, cette maladie chronique et progressive comporte des symptômes moteurs et non-moteurs qui diffèrent d’une personne à l’autre. Les causes de la maladie sont inconnues, mais on sait néanmoins que son développement est multifactoriel.
Outre les diverses options de traitement, le fait d’adopter une attitude mentale positive, s’engager dans des activités qui nous valorisent, avoir un partenaire soutenant et appartenir à une communauté aident la personne atteinte à aller mieux. L’activité physique peut retarder la progression de la maladie et notamment la danse, qui permet de travailler toutes les capacités motrices à la fois.
Voilà, j’espère que cet article vous aidera à mieux comprendre la maladie de Parkinson, que vous soyez directement affecté par cette condition, ou que cela concerne un proche.
Je suis allée voir un spectacle l’année passée qui parlait justement de la maladie de Parkinston au Pavillon des Sciences de l’Uqam avec un ami qui souffre de cette maladie. Voici un résumé du spectacle multidisciplinaire :
« Je suis Anne. J’ai 30-50-70 ans ? Qu’importe. J’ai la maladie de Parkinson.
J’ai l’impression qu’un animal a étiré ses bras dans mes bras, ses jambes dans mes jambes. Bienvenue dans ma vie en déséquilibre : les premiers symptômes, le diagnostic chez le médecin, la maladresse au quotidien, mais aussi la douceur de l’entraide et l’apaisement de la musique. Installez-vous inconfortablement comme si vous étiez moi. Mêlant théâtre, danse, musique et arts du cirque, ce spectacle riche en émotions a été cocréé par des chercheurs en neurosciences, des personnes vivant avec la maladie de Parkinson, et des artistes dans le cadre du projet Piece of Mind.
*Le titre de la soirée est tiré du poème Sur le fil, de Lili Saint-Laurent.