Depuis mon plus jeune âge, j’ai toujours aimé recevoir des massages. Avec l’arrivée de la maladie mentale dans ma vie, et l’isolement qui accompagne cette condition, ce besoin est devenu encore plus présent. J’ai donc entrepris, lorsque mes finances me le permettaient, de me rendre occasionnellement en massothérapie. Cela me faisait un plus grand bien, que mon humeur soit haute ou basse. Quand mon humeur était haute, le massage diminuait mon hyperactivité. Quand mon humeur était basse, le toucher me procurait une sensation de plaisir, ce qui diminuait mon stress et atténuait mes symptômes dépressifs.
D’une certaine façon, le fait d’être touché envoie au cerveau qu’on a de la valeur et donne de la confiance en soi. Chaque jour, je constate à quel point l’isolement, le stress et la dépression sont fréquents parmi mes pairs, c’est pourquoi la massothérapie en santé mentale a tout intérêt à se développer.
Un art et une science
Mais n’importe qui ne peut pas s’improviser massothérapeute ; la massothérapie est un art et une science qui demande un amour du toucher, la maîtrise de techniques spécifiques ainsi que des connaissances sur l’anatomie et la physiologie humaine. C’est pourquoi la Fédération québécoise des massothérapeutes (FQM) considère important de regrouper des massothérapeutes (agréés) formés avec les plus hauts standards de qualité.
Cet article vise ainsi à dresser un portrait de la FQM de même qu’à approfondir votre compréhension de cet organisme. La FQM est un organisme à but non lucratif (OSBL) qui intervient auprès de diverses populations, notamment les personnes âgées, les personnes ayant un problème de santé mentale, et plus encore.
La FQM…en bref !
Mais avant de vous parler des bienfaits du massage auprès des diverses clientèles, laissez-moi vous présenter la FQM. Comme je le disais plus haut, la FQM est un organisme à but non lucratif avec son propre conseil d’administration. Elle offre un soutien à ses membres si ceux-ci ont des questions, pour du mentorat et de l’aide au développement professionnel. Elle permet de créer des liens lors des colloques ou de l’Assemblée générale annuelle (AGA). Chaque massothérapeute-membre possède son approche, mais la FQM permet de dégager un langage commun basé sur les données probantes et les meilleures pratiques. Notons également qu’en 2010, la FQM a créé la Fondation de la massothérapie, dont la mission est d’apporter un mieux-être par le massage aux personnes gravement touchées par la maladie.
Sylvie Bédard
Sylvie Bédard, qui est native du Saguenay-Lac-St-Jean, est une entrepreneure sociale qui s’est engagée, au cours de sa trajectoire professionnelle, auprès de personnes marginalisées, comme les prostituées, les femmes victimes de violence conjugale, les personnes ayant des problèmes de santé mentale et les aînés en CHSLD. Elle s’est jointe à la FQM en 2006 et elle est actuellement présidente du conseil d’administration de la Fédération. À l’heure actuelle, Sylvie Bédard continue ses démarches auprès des instances gouvernementales afin d’encadrer la massothérapie au Québec. Elle a aussi débuté une formation en massothérapie.
Les partenariats (clientèle âgée et santé mentale)
Tout d’abord, lors des débuts de la FQM, une alliance avec la Fondation du cancer a été mise en place afin de soutenir les personnes atteintes de cancer et vivant en centre d’hébergement.
La FQM est ainsi une instance pour aider la population vieillissante. En effet, la direction de la FQM a reçu de multiples demandes de CHSLD afin que ces deux entités travaillent en collaboration. Les fondations des CHSLD sont prêts à financer des massages (les fondations des CHSLD paient 50%, la FQM paie 50%). Bien que ce modèle en démarrage soit prometteur, la FQM manque parfois de fonds pour desservir convenablement cette clientèle. Quoi qu’il en soit, les massages en CHSLD doivent être réalisés de façon extrêmement douce puisque les aînés ont une peau très fine.
Au niveau de la santé mentale, en 2015, la FQM a bâti un partenariat communautaire avec les Impatients, un organisme d’art-thérapie. Les usagers étaient relativement autonomes et suivis en ambulatoire. Ils s’adonnaient à de l’art-thérapie tout en recevant des massages sur une base occasionnelle. Les réponses ont été très positives puisque les usagers revenaient.
Or, cette année, la massothérapeute de la FQM pratiquant aux Impatients a quitté l’organisme d’art-thérapie pour se consacrer à une pratique novatrice en unité psychiatrique au CHUM. Elle est excitée par ce nouveau défi professionnel, et elle a hâte d’interagir avec d’autres types de thérapeutes, qui sont observateurs des changements des usagers.
Par ailleurs, dans la perspective d’un bri de service aux Impatients, un projet pilote de massothérapie à l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal (IUSMM) a été évoqué, mais faute d’argent, le projet a avorté.
D’où la nécessité d’investir plus de fonds pour établir des partenariats entre la FQM et des organismes en santé mentale. Et aussi la nécessité de former plus de massothérapeutes qui s’intéressent à la santé mentale.
La massothérapie
En plus d’aider à faire circuler les liquides (artères, veines, liquide lymphatique), la massothérapie peut être bénéfique dans le cas de la maladie d’Alzheimer. En effet, avec cette maladie, le fait de communiquer devient difficile. Mais le toucher bienveillant du corps vieillissant demeure. Au-delà de la détérioration physique et mentale, il y a toujours une possibilité de toucher : masser les mains, les pieds, la tête, le visage. Le massage peut également aider un proche à partir paisiblement.
En santé mentale, les enjeux de confiance sont primordiaux, et l’approche doit se faire tout en douceur. Étant globale et holistique, la massothérapie permet à la personne atteinte d’un problème de santé mentale de diminuer les tensions, de se réapproprier son corps et de moins focaliser sur son mental. Le massothérapeute doit aussi tenir compte de l’humeur de la personne, de ses hypersensibilités sensorielles et de la prise de médication psychotrope.
L’approche Trager
L’approche Trager est une approche très douce et toute désignée pour les personnes atteintes d’un problème de santé mentale. En effet, elle donne de l’aisance au mouvement et détend tout en énergisant. Lors d’une séance de Trager, la personne effectue passivement, avec l’aide du massothérapeute, des mouvements de bercements, d’élongations et de vibrations. Elle expérimente l’immense plaisir de se recentrer sur elle-même, en harmonie avec le corps et l’esprit.
Le massothérapeute Trager n’intervient pas où la personne a mal, car il n’y aura pas de réponse de la personne, voire même une certaine retenue. Donc l’approche du praticien consiste à aller aux endroits où il peut amener des sensations agréables au système nerveux, ce qui, ultimement, améliore l’humeur.
Louise de Montigny
Louise de Montigny est massothérapeute depuis 40 ans et elle est parmi les précurseurs de la massothérapie au Québec. Psychologue de formation, elle a travaillé dans les services sociaux pendant cinq ans. Ce travail n’était pas tout-à-fait satisfaisant pour elle, puisqu’elle était constamment dans l’urgence de régler des problèmes. Elle s’est mise à s’intéresser à des approches en psychologie où le toucher intervient comme la bioénergie. Louise de Montigny se questionnait jusqu’à quel point on peut intervenir par le corps, si on veut par exemple rejoindre les émotions d’une personne. Elle a appris différents types de massages, tels que le suédois et le shiatsu, jusqu’à ce qu’elle rencontre l’approche Trager (voir ci-haut).
La massothérapie auprès d’autres clientèles
Outre les personnes âgées et la santé mentale, les massothérapeutes de la FQM interviennent auprès d’une variété de clientèles : personnes en santé qui vivent du stress ou des céphalées, cancer, douleurs chroniques et santé musculo-squelettique, arthrite, enfants ayant des besoins spéciaux (autisme, TDAH) et femmes immigrantes enceintes.
Au niveau du cancer, les médicaments contre le cancer causent de l’œdème et une perte de mobilité. La massothérapie aide, de ce fait, à soulager la douleur causée par les traitements.
D’autre part, les massothérapeutes de la FQM interviennent en douleur chronique, notamment à la clinique de la douleur du CHUM. On peut retrouver des conditions telles que la fibromyalgie, des accidents de travail, des mouvements répétitifs, etc. Pour qu’elle soit qualifiée de chronique, la douleur doit se maintenir pendant plus de trois mois. Le massage procure une détente qui diminue la douleur : « C’est comme si je m’éloignais de ma douleur ».
Enfin, la FQM intervient également en périnatalité sociale, c’est-à-dire auprès de femmes immigrantes enceintes. Les massages sont réalisés essentiellement dans le contexte de traumatismes post-accouchements, dépressions post-partum et problèmes physiques qui ne se résorbent pas. Les massages s’effectuent sur les parents et non les bébés. Il est à espérer que ces femmes qui reçoivent un toucher bienfaisant vont toucher leur enfant de façon bienveillante.
Créer un ordre professionnel : pourquoi ?
Étant en retard par rapport à d’autres provinces canadiennes, la FQM milite pour la création d’un ordre professionnel des massothérapeutes au Québec. Cela assurerait la qualité de la profession et aussi l’imputabilité (protection du public).
Mais pourquoi y-a-t-il une résistance au Québec ? Selon une massothérapeute interrogée, il n’y a pas une unité de pensée ni de consensus au niveau de la population. Il doit aussi y avoir une volonté politique. Il faut prouver qu’une mauvaise pratique pourrait être préjudiciable pour la personne. Il y a également très peu d’écoles publiques qui enseignent la massothérapie ; c’est surtout des écoles privées. Un programme d’éducation au public aiderait à démocratiser la massothérapie et aiderait à la création d’un ordre professionnel.
Tout compte fait, nous espérons que les actions militantes de la FQM porteront fruit et que le gouvernement du Québec aura la volonté politique, comme ses homologues provinciaux, de créer un ordre professionnel des massothérapeutes.
Louise de Montigny se demande jusqu’à quel point on pouvait faire intervenir le cours pour rejoindre des émotions. Intéressant! Je me souviens que lorsque j’étais jeune, je suivais une thérapie qui s’appelait L’Abandon Corporel et c’était exactement cela. Cette thérapie faisait intervenir le corps pour rejoindre les émotions réprimées en nous.
Oui, le massage est très bénéfique. Je me demande si la danse thérapie peut aussi aider…